Définition et principes : augmentation mammaire

A – Théories et principes de la chirurgie d’augmentation mammaire

La décision d’entreprendre une augmentation mammaire ne doit jamais être prise à la légère. L’acte en lui-même n’est certainement pas techniquement le plus compliqué à réaliser pour un chirurgien compétent, mais beaucoup de décisions doivent être prises. Leur cohérence et la bonne compréhension sont absolument essentielles dans la satisfaction postopératoire de la patiente. Les conséquences à long terme de l’intervention doivent aussi avoir été discutées et acceptées pour éviter les décisions trop rapides et non motivées.

Alternatives thérapeutiques

Actuellement une seule alternative valable à la pose d’implants mammaires est proposées : le lipomodelage (transfert graisseux). L’injection de produit de comblement dans les seins a été interdite, principalement en raison des difficultés de suivi radiologique pour le cancer du sein.

B – Le lipomodelage ou le transfert graisseux pour augmentation mammaire

Le lipomodelage est une application localisée au seins de la technique de transferts graisseux appelée lipostructure, ou  lipofilling. La graisse est prélevée dans les surcharges localisées inesthétiques de la patiente et transférée ensuite par injection dans les seins.

Dans les bons cas, la technique présente deux avantages majeurs :

– Elle permet sans pose d’implants, d’obtenir des augmentations mammaires certes modérées, mais complètement naturelles, sans corps étranger, et ne donnant pas l’aspect d’un sein artificiel
– Elle permet d’obtenir dans le même temps une diminution des surcharges graisseuses localisées dans le ou les sites de prélèvement.

Mais le lipomodelage n’est pas applicable à tous les cas et présente les inconvénients liés aux incertitudes de la prise de greffe de graisse : limitation de la graisse disponible, nécessité d’envisager des retouches suite à la résorption post opératoire, problèmes des variations de poids,… En outre, la technique doit être réalisée dans un cadre de suivi radiologique précis pour permettre de différencier les calcifications induites par la prise de greffe de celles observées dans le cadre d’un cancer du sein.

C – Les choix

Le volume souhaité

La discussion concernant le volume est essentielle dans le processus de décision opératoire. Il faut déterminer quelles proportions la patiente recherche par rapport à son physique :
•    Un volume moyen, « naturel » pour une séduction en douceur,
•    Un volume plus gros que la moyenne, peut-être plus « sexy », mais certainement moins « naturel »,
•    Un volume très important, un « look hors norme » où le remarquable, le « hot », l’emporte avec une séduction agressive.

Ne laissez pas la peur du qu’en dira-t-on ou d’un jugement critique vous empêcher d’expliquer au Dr Le Louarn, ce que « tout au fond » vous voudriez comme changement d’apparence. – Non pas dans le but de satisfaire ce désir quel qu’il soit, mais pour se donner les moyens de déterminer avec lui, le meilleur compromis entre votre « corps fantasmé » et d’autres considérations tout aussi importantes, telles que : le regard des autres ou la pratique quotidienne d’un sport intensif, ou vos problèmes de dos… Cette franchise au début du processus permet une bonne compréhension mutuelle et diminue donc le risque de désillusion après l’intervention.

Le type d’implant à utiliser

Les implants mammaires sont tous constitués d’une enveloppe et d’un produit de remplissage mais la gamme est très variée et comme les résultats et les conséquences selon chaque choix sont très différents, les avantages et inconvénients de chaque élément doivent être parfaitement compris avant toute intervention.

L’enveloppe

L’enveloppe est toujours en élastomère de silicone. Elle peut être lisse (ce qui limiterait les risques d’épanchements) ou rugueuse (ce qui limiterait les risques de coques). Il existe des implants dont l’enveloppe de silicone est recouverte d’une couche de polyuréthane, ce qui pourrait contribuer à réduire l’incidence des phénomènes de coque

Le produit de remplissage

Il peut s’agir actuellement, soit de gel de silicone soit de sérum physiologique, soit d’hydrogel.

La silicone est une substance chimique gélatineuse plus ou moins cohésive. La silicone présente l’avantage par rapport au sérum physiologique de limiter les risques de plis. Si le gel utilisé est souple, les seins sont plus naturels mais il existe un risque de migration dans l’organisme avec l’usure de la prothèse ou en cas de rupture. Plus le gel est cohésif moins il y a de risque de dégonflement ou de fuite en cas de rupture de l’enveloppe mais plus le sein est ferme.
Donnant généralement un aspect plus naturel que les implants en sérum physiologiques, les prothèses en gel de silicone ont été énormément utilisées depuis plus de trente ans. Mais elles avaient été accusées de provoquer des maladies auto-immunes chez certaines patientes. Après une période de moratoire, l’AFSSAPS les a ré-autorisées en France car l’ensemble des travaux scientifiques ont apporté la preuve qu’il n’y a pas d’augmentation significative du risque chez les femmes porteuses de prothèses remplis silicone. Il n’en reste pas moins vrai qu’en cas de rupture, le sérum physiologique présente l’avantage d’avoir une absorption naturelle dans l’organisme tandis que la fuite de la silicone peut provoquer des granulomes à corps étranger (siliconomes) ou des réactions inflammatoires.

L’affaire PIP était un cas particulier puisqu’il s’agissait d’une fraude et de l’utilisation d’un gel industriel et d’un produit de polymérisation non controlé. Depuis en amont,  les contrôles ont été renforcés. En aval, une cellule de vigilance a été créé à la SOFCPRE par le Dr Le Louarn et un registre français des prothèses compatible avec le registre mondial ICOBRA est en cours de mise en place. Ceci augmentera beaucoup la sécurité des patientes, puisqu’on disposera d’échantillons beaucoup plus importants (en million de patientes) permettant des alertes beaucoup plus rapides.

L’hydrogel offre actuellement une troisième voie entre le sérum physiologique et la silicone. L’hydrogel paraît une solution plus « biologique » que la silicone puisqu’il s’agit d’un gel de sucre, tout en permettant une sensation plus « naturelle au toucher » que le sérum physiologique. L’inconvénient est l’éventuelle instabilité du gel qui peut devenir plus liquide avec le temps, approchant alors le résultat de celui obtenu avec un implant en sérum physiologique.

Gonflables ou pré-remplies?

Les implants sont dits « pré-remplis » de sérum physiologique ou de silicone lorsque le produit a été incorporé à l’usine et sont dits « gonflables » lorsque le chirurgien rempli les prothèses pendant l’opération. Seules les prothèses de sérum physiologique peuvent être gonflables. Les implants pré-remplis ont donc des volumes fixés par les fabricants alors que le chirurgien peut, dans une certaine mesure, adapter le remplissage des implants gonflables pendant l’intervention. Cependant les implants gonflables présentent un risque augmenté de dégonflement (partiel ou total, rapide ou lent) en raison de potentiels problèmes d’étanchéité de leurs valves de remplissage.

La forme : ronde ou anatomique ?

Suivant le cas de la patiente et la forme de sein désirée il peut être préférable de poser des prothèses rondes ou anatomiques.
Les prothèses anatomiques ont une forme en goutte d’eau, très intéressante pour les reconstructions et pour les femmes qui veulent obtenir un aspect très naturel (plus en poire que très rond). Cependant elles présentent l’inconvénient de faire des seins assez fermes (donc l’implant est beaucoup plus détectable à la palpation) et de pouvoir se retourner à moyen terme, complication qui rend alors le résultat tout à fait disharmonieux et nécessite une réintervention avec mise en place de prothèses rondes.
Les prothèses rondes peuvent être plus ou moins « profilées » ce qui veut dire que leur projection en avant est plus ou moins importante pour la même base. Dans certains cas, leur résultat peut être moins naturel que celui obtenu avec des prothèses anatomiques mais elles ne présentent pas de risque de retournement.

La situation de la prothèse

Durant l’intervention, l’implant peut être positionné directement derrière la glande mammaire (rétro-glandulaire) Le positionnement derrière la glande a l’avantage d’être moins douloureux dans les suites opératoires, mais les prothèses sont nettement plus visibles à travers la peau. Ce positionnement est donc réservé aux petits volumes placés chez des femmes à tissus sous-cutanés épais.

Le positionnement derrière le muscle donne une prothèse beaucoup plus discrète au repos cependant le mouvement des muscles peut être visible sur le sein à la contraction musculaire, ce qui ne serait pas le cas avec un sein naturel, il sera donc nécessaire de porter un t-shirt pour travailler les pectoraux en toute discrétion. D’autre part, ce positionnement nécessite de desinsérer une partie du muscle ce qui est contre-indiqué chez certaines sportives de haut niveau dont les performances pourraient être diminuées (tennis, javelot, …).

plastie_mammaire_position_retro_glandulaire

L’emplacement des incisions et donc des cicatrices

La cicatrice peut être située sous les aisselles (incision axillaire) ou sur l’aréole (incision trans aréolaire ou péri aréolaire) ou encore dans le pli sous-mammaire (incision inframmaire).

Certains types d’implants imposent le choix de l’incision. Par exemple, les prothèses anatomiques nécessitent le plus souvent une incision sous-mammaire pour assurer une ouverture suffisante et une bonne visibilité au chirurgien,

D’autres implants peuvent êtres passés indifféremment par une voie ou une autre. C’est alors d’autres considérations seront prises en compte :

– Avec la voie axillaire, lorsque la patiente lèvera les bras en débardeur, on peut dans certains cas voir 2 cicatrices révélatrices dans les aisselles. De plus, c’est l’incision qui assure le moins bon accès et la moins bonne visibilité au chirurgien pendant l’intervention, c’est donc celle qui permet la moins bonne prévention des hémorragies secondaires.

– La voie aréolaire sera exclue avec un implant important et un mamelon très petit et/ou très peu coloré.

1 et 2 sur l'aréole 3 sous mammaire 4 dans l'aisselle

Faut-il envisager en même temps une correction de ptose ou d’asymétrie ?

En cas de ptose (sein tombant, aréole basse et déformée), ou d’asymétrie mammaire une correction associée est souvent intéressante, voire souhaitable. Des cicatrices supplémentaires seront alors nécessaires pour réduire l’enveloppe cutanée distendue, remodeler les seins et replacer les aréoles en position correcte en même temps que l’on effectue la correction de volume. Une petite ptose peut être en partie masquée par une prothèses seule mais l’inconvénient est l’augmentation de la ptose à moyen terme en raison du poids de la prothèse.
Le but ultime de la chirurgie des seins étant un recouvrement de la féminité, il est préférable de sursoir à l’intervention si la patiente ne veut pas de cicatrices alors que les seins sont très ptosés ou avec des aréoles déformées. En effet, une augmentation de volume seule ne rendra pas ses seins plus esthétiques et la balance bénéfice/risque d’une augmentation mammaire sans correction des défauts sus mentionnés est défavorable.

Les conséquences de la pose d’implants mammaires : Les imprévisibilités de durée de vie des implants et les ré interventions secondaires

Une prothèse, qu’elle soit remplie de gel de silicone ou de sérum physiologique a une durée de vie limitée et inconnue, en raison des phénomènes d’usure de rapidité variable, la rupture de l’implant est un risque « attendu ». Une femme qui a un implant doit donc s’attendre à avoir un jour à remplacer ses prothèses pour que l’effet bénéfique des implants soit maintenu. Un contrôle de l’état des implants doit être entrepris devant tout signe évoquant une complication ou en cas de traumatisme. En plus de la surveillance gynécologique ou entrant dans le cadre du dépistage du cancer du sein, une consultation annuelle de contrôle chez le chirurgien est recommandée.

L’allaitement

L’implant n’a pas de retentissement sur l’allaitement et reste possible dans la plupart des cas. Toutefois, il est recommandé de ne pas se faire poser d’implants si une grossesse est envisagée dans un avenir proche. Par ailleurs, il est aussi esthétiquement déconseillé de poser des implants de volume très important avant les grossesses car la distension des tissus induite par les implants pourrait encore favoriser les vergetures et la ptose induites par la grossesse.

Les risques de cancer et de maladies auto-immunes (information SOFCPRE 2015)

Les très nombreux travaux scientifiques internationaux réalisés à grande échelle sur les maladies auto-immunes ont unanimement apporté la preuve qu’il n’y a pas plus de risque de survenue de ce type de maladies rares chez les patientes porteuses d’implants (en particulier en silicone) que dans la population féminine générale.
Jusqu’à récemment, l’état de la science laissait à penser que l’implantation de prothèses mammaires, y compris en silicone, n’augmentait pas le risque de survenue d’un cancer du sein. C’est effectivement toujours le cas pour les cancers du sein les plus habituels (adéno-carcinomes dont l’incidence n’est pas augmentée par la mise en place d’une prothèse mammaire.

Cependant, dans le cadre du dépistage du cancer après implantation, l’examen clinique et la palpation peuvent être perturbés surtout en cas de coque péri-prothétique ou de siliconome. De même, la présence des implants peut gêner la réalisation et l’interprétation des mammographies de dépistage à faire régulièrement. Il faut donc systématiquement préciser que vous êtes porteuses d’implants mammaires. Ainsi, certaines techniques radiologiques spécialisées (incidences particulières, images numérisées, échographie, IRM, etc.) pourront être utilisées en fonction des cas. Par ailleurs, en cas de doute diagnostique sur un cancer du sein, il faut savoir que la présence de prothèses peut requérir une exploration plus invasive pour obtenir une certitude diagnostique.

Le Lymphome Anaplasique à Grandes Cellules (LAGC) associé aux implants mammaires (LAGC-AIM) est une entité clinique très exceptionnelle qui a été individualisée récemment. Cette entité ne doit être recherchée qu’en cas de signe clinique avéré (épanchement péri-prothétique récidivant, rougeur du sein, augmentation du volume du sein, masse perceptible). Un bilan sénologique précis doit alors être réalisé afin de préciser la nature de la lésion. Dans près de 90 % des cas, cette entité est de très bon pronostic et elle guérit habituellement par un traitement chirurgical adapté associant l’ablation de la prothèse et de la capsule péri-prothétique (capsulectomie totale et complète). Dans environ 10 % des cas, la pathologie est plus grave et nécessite une prise en charge par chimiothérapie et/ou radiothérapie au sein d’une équipe spécialisée dans le traitement des lymphomes.